Fréjus-Hyères
Pour fêter l'arrivée du printemps
La chapelle Notre Dame de Jérusalem (Cocteau) : l'historique
Laissée à l’abandon plusieurs années, la Ville de Fréjus acquiert la chapelle et la fait restaurer en 1989, elle sera classée Monument Historique le 20 janvier de la même année. À la fin de l’été 1962, Cocteau cède à la requête du Vatican d’aménager un sanctuaire pour l’ordre du Saint-Sépulcre à Fréjus.
L’ordre du Saint-Sépulcre de Jérusalem est un ordre religieux créé par Godefroy de Bouillon après la prise de Jérusalem en 1099. Cet ordre a pour fonction de protéger le Saint-Sépulcre mais aussi la vie liturgique du sanctuaire et, par la suite, l’ensemble du royaume franc de Jérusalem. En 1489, Innocent VIII décide de la suppression de l’ordre canonial et de son incorporation à l’ordre de Saint – Jean de Jérusalem. Depuis 1868, existe l’ordre équestre du Saint-Sépulcre de Jérusalem.
Né de la volonté d’un banquier niçois, M.Martinon, le projet de la chapelle dans le quartier de la Tour de Mare à Fréjus est conçu avec l’architecte Jean Triquenot, qui s’inspire du tombeau du Christ, de l’église Santa-Fosca sur l’île de Torcello à Venise, ainsi que du Panthéon de Rome (Cité directement par Jean Triquenot). La première pierre est posée le 24 février 1963. Après la mort de Jean Cocteau, c’est Édouard Dermit qui terminera le travail en 1965. Les vitraux sont de Raymond Moretti, artiste peintre Niçois et les céramiques de Raymond Pelissier de Fréjus. Les mosaïques extérieures seront exécutées en 1992 par Laetitia Léotard et Henri Virmouneix.
La Chapelle de Fréjus est une des dernières œuvres de Jean Cocteau, tout comme les vitraux de l’église Saint-Maximin de Metz, terminés à la fin des années 60. Le thème iconographique à l’intérieur repose essentiellement sur la « Passion du Christ » et la chevalerie des croisades. La passion du Christ est un ensemble d’évènements qui ont précédé et accompagné la mort de Jésus. On y trouve la Cène, la Crucifixion, l’Arrestation du Christ, la Vierge aux 7 douleurs, la Résurrection, mais aussi l’ange annonciateur de l’Apocalypse et des personnages hiératiques qui psalmodient autour d’un christ. Mais on y perçoit également beaucoup de référence aux chevaliers des croisades, chevaliers du Temple, du Saint-Sépulcre ainsi que le cri de guerre des croisés « Dieu le Veult ».
Quelques éléments biographiques sur l’artiste :
Jean Cocteau est né le 5 juillet 1889 à Maison-Laffite et mort le 11 octobre 1963 dans sa maison de Milly-la Forêt. Premier drame, son père se suicide le 5 avril 1898, Cocteau à 9 ans. À 15 ans il est élève au lycée Condorcet, mais manifeste peu d’intérêt pour les études, il est renvoyé du lycée pour indiscipline en 1904 et rate son baccalauréat deux fois.
Inspirateur du surréalisme, collaborateur au mouvement Dada, il a une grande influence sur le travail des autres avec Erik Satie, compositeur contemporain français. Poète, graphiste, dessinateur, dramaturge et cinéaste, il est élu à l’Académie française en 1955, fauteuil N°31. On pourrait ajouter, romancier, peintre, lithographe, céramiste, tapissier … Réformé en 1914, il participe à la guerre comme ambulancier.
La mort soudaine de son ami Radiguet en 1923, dont il partageait le penchant pour l’Opium, le fait venir à Villefranche sur mer à l’hôtel Welcome. Un autre drame survient en 1930, avec sa liaison à Nathalie Paley. Elle aurait été enceinte du poète, grossesse qui n’aurait pu être menée à son terme. Avortement ou effet de l’opium, on ne saura jamais.
Cocteau entretiendra ensuite une relation avec deux acteurs, Jean Marais et Edouard Dermit, ce dernier est officiellement adopté par Cocteau et sera à l’origine du succès d’Edith Piaf. En effet, en 1940, la pièce de théâtre, « Le Bel Indifférent » écrite pour Édith Piaf est une grande réussite. Parmi les immenses succès qui le font passer à la postérité on peut citer « La Belle et la Bête » (1946). Il préside le jury du festival de Cannes en 1953 et 1954.
Jouant un rôle ambigu pendant la seconde guerre mondiale, il fait surtout preuve d’un certain pacifisme et il s’engage par la suite dans la défense du droit à l’objection de conscience. Au printemps 1950 il est invité à la Villa Santo Sospir à Saint Cap Ferrat, villa de Francine Weisweller, qu’il décore, encouragé par Matisse. Il se plait tellement dans cette maison, qu’il y revient pendant onze ans. En 1960, il tourne le « Testament d’Orphée » avec le soutien financier de François Truffaut. Il décède le même jour qu’Édith Piaf, à l’âge de 74 ans. Il est enterré dans la chapelle Saint-Blaise-des-Simples à Milly la forêt. Il écrira peu de temps avant sa mort : « Bien sûr que je crois. Bien sûr que je prie, mais il ne saurait être question de votre dieu » et l’épitaphe sur sa tombe annonce : « Je reste avec vous ». Édouard Dermit, qui a réalisé les dessins dans la chapelle, après la mort de l’artiste, (120 esquisses avaient été réalisées par Jean Cocteau pour cette chapelle), viendra le rejoindre dans le même caveau en 1995.
Hyères musée des cultures et du paysage
Parcours permanent
Le parcours muséal retrace les différentes étapes de l’histoire humaine et culturelle qu’a connu la ville d’Hyères. Il est ainsi possible de suivre les allées et venues des activités humaines liées à ce paysage hyérois si spécifique. Simultanément chronologique et thématique, le parcours des collections permanentes invite à appréhender la société hyéroise en quatre phases : ses origines, ses cultures agricoles, ses périodes de villégiature et sa culture artistique.
Pour ce circuit, le musée fait le pari de faire dialoguer l’art contemporain avec ses collections patrimoniales. Chaque salle présentera une oeuvre moderne ou contemporaine pour interroger le visiteur.
Salle 1 | Les racines du paysage hyérois
La diversité des peuplements depuis la préhistoire a modelé la formation du paysage. L’homme s’installe sur le territoire hyérois à partir du Chalcolithique (âge du cuivre vers 3 000 ans avant notre ère). Si son impact sur l’environnement n’est pas véritablement décelable, il faut attendre sa sédentarisation pour collecter les premières traces de son occupation.
L’oppidum celto-ligure construit vers la fin du VIe siècle avant notre ère, sur la colline de Costebelle, constitue la première forme d’habitat groupé et fortifié du territoire. Il est abandonné vers le milieu du IVe siècle avant notre ère, au moment où les Grecs de Massalia [Marseille] fondent, sur le bord de mer, une colonie-forteresse : Olbia [en grec : la Bienheureuse]. Elle est l’unique témoin, conservée dans l’intégralité de son plan, d’un véritable réseau de colonies forteresses massaliètes.
Les premiers Olbiens étaient des soldats colons, pêcheurs, agriculteurs et avaient comme mission principale de sécuriser le commerce maritime.
En 49 avant notre ère, après la prise de Marseille par les troupes de César, Olbia passe sous le contrôle de l’administration romaine. L’activité économique d’Olbia bascule vers un centre de services et d’accueil avec l’ouverture de bains thérapeutiques alimentés par la source de San Salvadour.
Les cultures de la vigne, du blé et de l’olivier, déjà initiées par les Grecs, s’étendent alors dans toute la région. Du fait de l’insécurité grandissante en bord de mer, la population abandonne le site d’Olbia au début du VIIe siècle, en partie au profit des hauteurs de la colline du Castéou.
Salle 2 | Le patio aux orangers
Hyères a toujours été célèbre pour la luxuriance de ses vergers d’orangers. La dérivation des eaux du Gapeau et la création en 1458 du canal du Béal par Jean Natte rendent possible l’acclimatation de cet agrume.
Cultivé initialement pour l’essence de sa fleur, l’oranger devient peu à peu convoité pour son fruit. Au XVIème siècle, Hyères devient la ville des Orangers. Conscient du privilège de pouvoir cultiver un tel arbre sur leurs terres, les Hyérois n’hésitent pas à
mettre en avant leur production pour subjuguer les souverains à chacun de leur passage.
En 1564, à la veille de l’arrivée de la reine Catherine de Médicis et de son fils, le roi Charles IX, les habitants prennent soin d’installer deux rangées d’orangers le long de la route et d’édifier une fontaine remplie d’eau parfumée à la fleur d’oranger.
Émerveillée, Catherine de Médicis décide de planter un domaine d’orangers, situé sur l’emplacement actuel du musée. Au XVIIe siècle, les jardins de la Couronne s’agrandissent grâce au legs de l’évêque de Digne au roi Louis XIV d’un terrain s’étendant jusqu’à l’actuelle voie Ritondale.
Ainsi naissent les Jardins du Roy qui deviennent des pépinières pour les serres et jardins de Versailles. En 1660, le Roi-Soleil vient le visiter et déclare : « La cour s’était beaucoup plu à la douceur de ce climat, à la beauté de cette campagne et à la bonne odeur de ses orangers. »
L’exploitation de ce domaine se poursuit jusqu’à son aliénation à la Révolution où Jean Baptiste Filhe, agronome et maire d’Hyères, rachète une partie des 18 000 orangers du domaine.
L’installation contemporaine de Mickaël Obrenovitch présente dans le patio redonne à cette histoire toutes ses lettres de noblesse.
Salle 3 | Hyères et les salins
La récolte du sel a probablement été initiée sur nos rivages dès l’Antiquité par les habitants d’Olbia. La rade réunit toutes les conditions pour l’implantation de salins : une vaste zone lagunaire ensoleillée et balayée par les vents.
La production de cette denrée rare et précieuse confère rapidement son identité à la ville. En 963, la charte du roi de Bourgogne atteste conjointement de l’existence de salins et de ce lieu baptisé Eyras [aires salantes – ce vocable évoluera pour aboutir à Hyères], preuve du lien qui unit la ville au sel.
Les salins d’Hyères atteignent leur âge d’or au XIIIe siècle, exportant largement en dehors des frontières. Au XIXe siècle, la demande en sel s’accroît de nouveau. En 1856, la Compagnie des Salins du Midi acquiert les Vieux Salins puis, en 1967, le Salin des Pesquiers créé en 1848 par la Société des salins et pêcheries au cœur de la presqu’île de Giens.
Chaque salin emploie alors 60 ouvriers et 300 saisonniers pour la récolte d’été, pour la plupart des Italiens. La production des salins (40 000 tonnes) cesse en 1994.
Gérés et protégés par le Conservatoire du littoral depuis 2001, les salins abritent une exceptionnelle biodiversité : 320 espèces d’oiseaux et près de 300 variétés de plantes.
Dans ce milieu dessiné par l’exploitation salinière, les conditions écologiques favorisent la création d’un écosystème où les oiseaux viennent trouver refuge, conférant à ce paysage son caractère.
Salle 4 | Hyères et ses nouvelles cultures
Après la culture du sel, le développement de nouvelles cultures transforme radicalement l’aspect paysager.
Autrefois simple lieu de passage, la plaine reçoit au XVIème siècle les nouvelles variétés de primeurs (melons, artichauts, pêches, fraises, haricots, etc.) et de fleurs à bulbes plantées sous serres.
Conscient du potentiel de ce territoire, le ministre de Louis XIV, Jean-Baptiste Colbert, décide d’implanter des cultures florales dans la région pour fleurir les demeures royales de Sa Majesté. Interrompu au moment de la Révolution française, le développement de la floriculture provençale prend un nouvel essor au XIXème siècle.
Désormais, les principaux propriétaires hyérois s’orientent vers la production de fleurs coupées. L’iris, la rose, l’anémone, la pivoine ou la violette impériale sont exportés dans les grands centres européens, offrant une notoriété internationale à la ville.
Hyères se révèle être un véritable laboratoire d’expérimentation horticole. L’introduction de palmiers, de mimosas et de cactées témoignent des pratiques d’acclimatation des végétaux exotiques sur le sol hyérois.
Ces expérimentations sont menées sous l’impulsion de personnalités telles que l’impératrice Joséphine ou Geoffroy Saint-Hilaire, directeur du Jardin d’acclimatation de Paris. Ce dernier établit même une annexe du Jardin d’acclimatation à Hyères. Les espèces subtropicales apportent une touche d’exotisme aux jardins des somptueuses résidences que de riches hivernants érigent à Hyères en cette fin de XIXème siècle.
Salles 9 & 11 | Le cabinet de Bénézit
En 1930, alors que les premiers estivants affluent sur les plages hyéroises, un nouveau conservateur est nommé à la tête du musée municipal : Emmanuel-Charles Bénézit. Venu pour des raisons de santé à Bormes-les-Mimosas, il tombe rapidement sous le charme de la cité hyéroise. Fils du célèbre auteur du dictionnaire Bénézit, il baigne depuis son enfance dans les milieux artistiques fréquentés par son père.
Ainsi met-il à profit ses relations pour enrichir considérablement les collections Beaux-Arts du musée d’Hyères.
Emmanuel-Charles Bénézit s’attache à constituer un ensemble aussi complet que possible d’œuvres caractéristiques des mouvements artistiques des XVIIIes et XIXe siècles.
En 1932, il précise l’orientation de sa collection : « Notre programme s’étend donc volontairement de 1830 à 1880 […] Nous avons également pour ligne de conduite : tout ce qui est méridional est nôtre. » Cinq ans après son arrivée, la collection compte 235 œuvres supplémentaires.
Il fait judicieusement l’acquisition de 16 œuvres ayant figuré au Salon des artistes français de Paris entre 1830 et 1900. Les 64 dons et legs qu’il accepte en sont également un précieux complément.
L’accrochage de cette salle évoque ses choix artistiques en illustrant les principaux courants de la peinture de la première moitié du XIXe siècle depuis le néoclassicisme jusqu’au romantisme.
Témoins du développement de la photographie, les peintres modifient leurs techniques picturales et de nouveaux courants artistiques émergent lors de la seconde moitié du XIXème siècle. Fin connaisseur de l’histoire de l’art, le conservateur Emmanuel-Charles Bénézit poursuit sa politique d’acquisition vers des œuvres caractéristiques de ces nouveaux mouvements du réalisme et du naturalisme.
D’une part, la série d’Isidore Pils témoigne de cet intérêt naissant pour les scènes de la vie quotidienne suivant l’idée de Courbet, qui cherche comment « traduire les mœurs, les idées, l’aspect de son époque » (cf. Le Réalisme, 1855).
D’autre part, la collection de tableaux, représentant des peintres en plein air, traduit un nouveau désir de proximité avec la nature : le peintre sort de l’atelier et peint directement sur le motif. Le paysage n’est plus un simple sujet mais son interprétation confère un nouveau regard sur le monde. Lui-même artiste, Emmanuel- Charles Bénézit documente la vie des peintres en constituant un fonds d’œuvres les représentant dans leur quotidien.